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En permaculture, le jardin devient une partie d’un tout plus large, son environnement, avec lequel il faut tisser des liens concrets : échanges matériels (graines, plants, récoltes) ou immatériels (travail, savoirs par exemple), mise en continuité des lieux de vie ou de passage de la faune (trous en bas des murs de clôture pour les hérissons, continuité des haies pour la circulation de leurs habitants…), emprunts de la vue, des arbres extérieurs.

Le jardin est ensuite l’objet d’une réflexion globale pour que chaque élément apporte désormais quelque chose au reste du jardin et de ses habitants (humains, animaux et végétaux) et qu’à terme, l’ensemble fonctionne comme un écosystème le plus résilient possible. Pour cela; il faut faire un peu de ménage et changer sa manière de travailler

Je fais le ménage dans mes produits et mes outils

Cette étape va consister à revoir complètement le matériel et les produits utilisés auparavant. Si vous jardiniez déjà en bio, une partie est déjà probablement sur place. Cette démarche, globale, s’accompagne d’autres mesures : la connaissance du sol, une fertilisation adaptée aux végétaux, des espèces adaptées au terroir…

Je me débarrasse des produits et des outils indésirables

Depuis le 1er Janvier 2019, la loi Labbé interdit aux jardiniers amateurs d’utiliser et même de détenir des produits phytosanitaires de synthèse sauf ceux autorisés en agriculture biologique, les substances de base et les produits de biocontrôle. Tous les autres produits phytosanitaires de la gamme amateurs sont interdits à la vente. Portez à la déchetterie tous les insecticides, fongicides, désherbants qui vous restent. Vous n’avez plus le droit de les épandre. Ces mesures, difficiles à admettre pour certains jardiniers, sont pourtant destinées à diminuer les risques pour la santé humaine, protéger les plantations, les récoltes, la biodiversité, limiter la pollution de l’air, de l’eau, des sols et même de la maison.

De la même manière, les motoculteurs (destinés aux moyennes et grandes surfaces) et motobineuses (petites surfaces < 1000m²) deviennent obsolètes. Pourtant, ils ont été très longtemps incontournables : avec relativement peu d’efforts, ils garantissaient l’aération du sol et l’éradication (apparente du moins) des adventices. Mais ils présentent aussi de nombreux inconvénients : ils fonctionnent à l’essence (bien qu’il existe des motobineuses électriques), et rejettent donc du CO2. Ils sont bruyants. Le motoculteur est lourd, difficile à manier, cher à l’achat et à l’entretien. Il leur faut un abri facile d’accès. Mais surtout, leur inconvénient majeur est de perturber l’activité biologique du sol, de détruire les précieux vers de terre, de bouleverser les différentes couches du sol et de rompre les équilibres naturels. De plus, les lames coupent les rhizomes des plantes indésirables en mille petits morceaux qui ne demandent qu’à se réenraciner.

J'adopte les bons produits

Il reste au jardinier les produits de biocontrôle. Mais qu’est-ce qui se cache sous ce terme un peu obscur ? Le biocontrôle est l’ensemble des méthodes de protection des végétaux qui vise à l’équilibre des populations d’agresseurs et non à leur éradication. Les produits de biocontrôle sont quatre types :

Les macro-organismes (insectes, nématodes…)
Les micro-organismes (virus, bactéries)
Les médiateurs chimiques (phéromones, kairomones)
Les substances naturelles d’origine végétale, animale ou minérale (extraits de plantes, huiles, soufre, biocarbonate…)

Ces produits sont rassemblés dans une liste publiée et régulièrement mise à jour par le ministère de l’Agriculture. A ce titre, les produits à base de Bacillus Thuringiensis (contre les chenilles), l’acide pélargonique (matière active pour désherbant), des huiles de colza, d’orange douce, de paraffine, les pyréthrines (insecticides), le phosphate ferrique (antilimace), le soufre (fongicide) sont autorisés. On y inclut aussi entre autres les larves de coccinelle, contre les pucerons. Ces produits sont soumis aux exigences européennes concernant la préservation de la santé humaine, animale et environnementale, ils bénéficient donc de procédures, d’évaluations et de demandes d’autorisations de mise sur le marché (AMM).

Mais attention, ils restent à utiliser avec parcimonie et intelligence. Certains produits inclus sur la liste des produits et biocontrôle ne sont paradoxalement pas autorisés en agriculture bio. C’est le cas de l’acide pélargonique, par exemple, qui est un désherbant à action rapide, mais qui détruit la faune du sol. La molécule est corrosive pour la peau et le produit est d’ailleurs classé comme étant dangereux pour l’environnement par certains fournisseurs nord-américains.

J'achète l'outil indispensable

Un bon permaculteur ne peut se passer de sa grelinette. Cette fourchebêche spéciale est un outil de travail respectueux de l’équilibre naturel du sol, qui ameublit la terre sur une trentaine de centimètres, laère sans la retourner ni mélanger les différentes couches du sol. Le jardinier travaille vite, sans trop d’effort et en préservant son dos.

De quoi s'agit-il ?

Basé sur le principe du levier qui démultiplie la force du jardinier, cet outil a été breveté par André Grelin en 1963. Il a alors pris le nom de grelinette. Depuis, divers fabricants ont produit des modèles similaires, baptisés de noms fantaisistes : fource écologique, aérabêche, bio-aérofourche, tarabate, biobêche, biogrif, bioculteur, fourche bio, biobêche humifère, aérobêche, campagnole, la plaisible… Les différences se nichent dans les détails : griffes interchangeables ou soudées, biseautées ou non, droites ou courbées, présence ou non d’un arceau au-dessus de la barre horizontale, présence d’une poignée horizontale. Il existe même des modèles pour enfants à 3 griffes ! Un modèle russe, inventé en 2010, est muni de contredents horizontales qui brisent les morceaux de terre agglomérés. Un autre modèle, la campagnole, muni de deux roues latérales et de contredents horizontales, s’en est inspiré et a vu le jour en 2015.

Comment l'utiliser ?

La grelinette classique est dotée de deux manches latéraux fixés sur un peigne (la partie métallique sur laquelle les dents de l’outil sont fixées). On reste le dos droit pour la manipuler et ce sont la force des bras et le poids du corps qui entrent en jeu tandis que la courbure des griffes accentue l’effet de levier avec un minimum d’efforts. Placez-vous à une extrémité de la surface à décompacter en tenant l’outil devant vous, un manche dans chaque main. Les griffes sont courbées vers l’extérieur. Plantez les dents droit dans le sol en exerçant une pression ferme au centre de la fourche-bêche avec le pied. A la force des bras, basculez ensuite la force d’arrière en avant pour décompacter la terre, puis d’un côté et de l’autre pour briser la motte. Retirez la fourche en la tirant vers vous sans la soulever et reculez d’un pas. Recommencez.

Comment la choisir ?

Les prix varient de 50 à 150€, et bien sûr, la qualité est proportionnelle au prix. Conseil d’ami : c’est un outil qui dure une vie, mieux vaut y mettre le prix. La plupart des utilisateurs perçoivent d’ailleurs cet outil écologique comme un investissement. Il est conseillé d’acheter un outil avec un acier qualitatif, fabriqué en France. Les outils d’importation ont des normes de qualité très tolérantes. Les griffes soudées ont l’avantage de diminuer les risques de corrosion. Les outils peuvent avoir de 2 à 9 dents. Pour un usage non professionnel et régulier, nous vous conseillons un outil à 4 dents, au poids encore raisonnable et doté d’une largeur de travail correcte.

J'explore le voisinage

Par échange, le permaculteur ne désigne pas que les choses matérielles. Bien sûr, on peut récupérer, échanger ou donner des feuilles mortes, du bois, des plants, des graines, des fruits et légumes, du matériel. Mais on peut aussi partager des connaissances, des tours de main. On peut effectuer certaines tâches en commun pour les rendre moins pénibles, ou moins coûteuses (transport).

Le savoir des anciens

Les jardiniers présents depuis longtemps dans votre région ont beaucoup à vous apprendre. Ils connaissent les dates optimales de semis, de plantations. Ils possèdent souvent des graines adaptées à la région, au microclimat local. Ils connaissent la terre et possèdent des informations historiques. Comment s’appelait le lieu autrefois (parfois, une bonne indication de la qualité du sol), qu’y avait-il avant, où sont les sources, où sont les sources, où y a t-il des puits, quel est leur potentiel, etc. Ils connaissent aussi d’autres jardiniers, ils savent quels jardins se visitent, s’il y a des associations locales de jardiniers. Ils sont souvent une mine de conseils.

Le savoir des autres cultures

Avec le réchauffement climatique et avec éventuellement l’aide d’une petite serre, on peut cultiver des fruits et des légumes nouveaux. Vous avez peut-être certains voisins qui connaissent la culture de la chayotte (Sechium edule, chouchou, christophine selon les pays), une liane dont les fruits denses remplacent les pommes de terre et que l’on retrouve aussi bien aux Antilles françaises qu’en Guyane ou à la Réunion, en Nouvelle-Calédonie ou en Polynésie française. Lancez-vous dans la culture de la patate douce (Ipomoea batatas), cultivée entre autres en Australie, du gombo ou okra (Abelmoschus esculentus), une annuelle de la famille de la mauve qui remplace les haricots verts que l’on trouve sur les marchés mexicains. Tentez l’igname (Dioscorea batatas), un gros tubercule africain parfaitement rustique. Essayez le taro (Calocasia esculenta), emblématique des Tropiques (la variété « Pink China » est très rustique). Plantez du canna comestible (Canna edulis), donné en fécule aux enfants martiniquais, et de la baselle ou épinard de Malabar (Basella alba), beaucoup cultivée en Asie ou à la Réunion.

Le savoir des jeunes

Certains jeunes ont envie de jardiner et d’avoir la main verte. Ils ont aussi des capacités en informatique et peuvent vous mettre au courant des dernières applications pour jardiner, trouver sur le Net de la documentation sur des plantes rares, ou vous mettre au courant des derniers gadgets du jardinage connecté. Rapprochez-vous des écoles de votre quartier. Leurs jardins sont des lieux où des jardiniers expérimentés peuvent enseigner aux jeunes générations comment produire la nourriture.

Les échanges matériels

Si vous cultivez une parcelle dans un jardin communautaire, c’est l’endroit idéal pour partager et enrichir vos savoirs : proposez à vos voisins de travailler ensemble pour pailler les allées, construire des carrés surélevés, des cabanons, des clôtures, des treillages… Faites aussi le tour du quartier pour voir ce que vous pouvez échanger ou récupérer, feuilles mortes, tontes d’herbe, branchage, graines, plants…

J'adopte les légumes vivaces

Les légumes vivaces ont toute leur place en permaculture : ils sont installés pour de longues années, leur culture ne bouleverse pas le sol et ils sont productifs. En association avec des légumes annuels, ils représentent un excellent apport.

Les inconvénients

Ils sont souvent envahissants. L’exemple le plus criant est celui des topinambours : un petit tubercule laissé en terre redonne une vraie touffe dans la saison.
Beaucoup ont des saveurs prononcées, et les enfants n’en sont pas forcément fans ! Ces légumes sont en effet souvent plus proches de l’espèce sauvage et n’ont pas été travaillés par les sélectionneurs pour en adoucir ou améliorer le goût. La roquette vivace (Diplotaxis tenuifolia) par exemple est amère…
Une fois qu’ils sont en place, ils le sont pour plusieurs années et il n’y a pas de rotations prossibles. Le chénopode bon-Henri peut rester dix ans à la même place.
On ne peut obtenir plusieurs légumes différents dans la même année, sur la même parcelle. Avec les légumes vivaces, pas possible de récolter au même endroit des radis en avril, de la salade en mai et des tomates en juillet…
Certains légumes vivaces, comme la glycine tubéreuse (Apios americana), ne donnent rien avant 2-3 ans.

Les plus

Ils augmentent la biodiversité, le nombre d’espèces et de variétés cultivées dans le jardin, donc la résilience de l’écosystème.
Ils sont concentrés en minéraux, antioxydants et nutriments.
Ils sont en général plus résistants que les légumes annuels. Ils produisent en effet plus d’alcaloïdes, de terpénoïdes et de polyphénols, ces molécules qui agissent comme leurre olfactif, répulsif ou insecticide naturel.
Ils demandent un entretien minime. Leur système racinaire est beaucoup plus développé que celui des annuelles et va chercher l’eau et les nutriments en profondeur. Beaucoup de légumes vivaces disposent d’organes de réserves (bulbes, rhizomes ou tubercules), qui stockent eau et nutriments pour les temps de crise (ail des ours, ail et oignon rocamboles, oca). Une autre raison est que beaucoup de légumes perpétuels poussent principalement au printemps, quand la terre est encore bien humide. En été, quand la majorité des légumes annuels poussent, les vivaces font une pause dans leur croissance et demandent beaucoup moins d’eau.
Certains peuvent être récoltés toute l’année (roquette vivace, ciboule de Chine, petite pimprenelle…)
D’autres sont ornementaux (hémérocalle, capucine tubéreuse, épilobe en épi, campanule des murets Campanula poscharskyana…).
On peut avoir des récoltes plus tôt en saison. Et on peut forcer à l’intérieur un grand nombre de légumes vivaces en hiver : chicorées et pissenlit par exemple, mais aussi violette, alliaire officinale, arroche maritime (Atriplex halimus), picridie (Reichardia picroides).
De nombreux légumes vivaces poussent en sol pauvre. Vous pouvez les installer dans les coins les plus déshérités du potager et gagner ainsi de la place. C’est ainsi que les alliums vont se plaire en terre caillouteuse, le cresson des fontaines dans les zones trop humides du jardin et le crambe maritime dans un terrain en bord de mer.
Vous pouvez aussi faire pousser certains légumes vivaces à l’ombre, là où les annuels refusent de croître.

Je mets en place les conditions de l'abondance

En permaculture, l’abondance est valorisée. Si l’autonomie strictement individuelle est intéressante, celle d’un quartier ou d’une communauté l’est encore plus. Si votre voisine produit des framboises et que vous avez des pommes de terre en abondance, l’échange est productif.

5 Astuces pour augmenter vos rendements

Utilisez les verticales

Plantez au pied du cabanon, contre la maison, installez des treillis, des structures en osier : potimarrons, concombres, haricots, pois libéreront de la place au sol pour d’autres cultures non grimpantes.

Nourrissez votre sol

Ou plutôt les millions de micro-organismes qui y habitent et qui font sa véritable richesse. Les chiffres donnent le tournis : 1g de terre (soit environ le volume d’une cuillerée à café) héberge en moyenne 100 arthropodes, 1000 à 2000 nématodes, des millions de protozoaires et des centaines de millions de bactéries, et plus d’1 milliard de cellules bactériennes, issues de plus d’1 million d’espèces ! Paillez, mulchez, couvrez la terre avec de la matière organique pour protéger cette vie : compost, feuilles, paille, mélangés ou non avec du fumier mûr.

Réfléchissez bien aux successions de vos cultures

Commencez par exemple par les légumes qui demandent de la fraîcheur (pois, fèves, radis…), au printemps. Faites-les suivre par des salades puis des légumes d’été (tomates, courges, aubergines), des choux chinois à semer fin août, puis des épinards et de la mâche.

Vous pouvez en plus jouer sur les variétés, et planter des variétés très précoces et d’autres très tardives.

Vous pouvez associer au même endroit des plantes à la vitesse de croissance différente (radis et carottes ou panais).

Démarrez vos plants tôt en saison

Ceci est surtout valable pour les cultures d’été, comme les tomates, les aubergines, les melons. L’important est d’avoir suffisamment de lumière pour que les plants ne s’étiolent pas.

Lancez-vous dans la culture de primeurs

Navets : Semez fin Janvier et Février

Petit pois : fin Janvier, semez sous tunnel. Premières cueillettes en Avril.

Pommes de terre : plantez sous châssis à la mi-Février.

Carottes : fin Janvier, début Février, semez des variétés courtes ou demi-longues sous tunnel ou châssis. Premiers arrachages au bout de 60 à 70 jours.

Laitues : fin Janvier, semez des laitues qui germent facilement à basse température. Ne semez pas trop dru pour obtenir des plants trapus et vigoureux. Premières récoltes mi-Avril.

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